Dans une décision rendue en fin d’année dernière, le Tribunal fédéral suisse (TF) a admis que le ministère public puisse recourir contre la décision du Tribunal des mesures de contrainte refusant d’autoriser une mesure de surveillance, bien que cela ne soit pas prévu par le Code de procédure pénale fédéral (CPP) (arrêt 1B_376/2011). Cette décision a déjà été évoquée dans un précédent billet car elle confirmait la légalité de la recherche par champ d’antenne.

Le CPP ne prévoit aucun recours cantonal contre la décision du Tribunal des mesures de contrainte autorisant ou refusant une mesure de surveillance (il en va différemment en matière de détention par exemple, puisque le code prévoit le droit du prévenu de recourir). Ce n’est qu’après avoir reçu la communication (c’est ainsi que la loi appelle l’information qui est transmise à la personne qui a fait l’objet d’une mesure de surveillance) qu’un recours contre l’ensemble de la procédure de surveillance peut être déposé (contrôle a posteriori). Au moment de la décision du Tribunal des mesures de contrainte, la personne surveillée n’en a pas connaissance et elle ne souffre donc pas de l’absence de voie de recours. Quant au ministère public, si sa demande est refusée il a toujours la possibilité d’en déposer une nouvelle (l’effet de l’autorisation accordé par le Tribunal ne sera toutefois valable qu’à compter du moment où la seconde surveillance est ordonnée et les résultats qui ne figureraient que dans la première seront inexploitables). Du moins en était-il ainsi jusqu’à la décision du TF du 3 novembre 2011.

Le TF s’est appuyé sur une disposition de la Loi sur le Tribunal fédéral (LTF) pour désormais admettre un droit de recours du ministère public contre le refus d’autoriser une mesure de surveillance. L’art. 93 LTF prévoit une exception et permet un recours contre des décisions préjudicielles et incidentes qui peuvent causer un préjudice irréparable ou si l’admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d’éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.

Vers un droit de recours de la personne surveillée?
De jurisprudence constante le Tribunal fédéral a jusqu’ici refusé d’entrer en matière sur un recours en matière de surveillance déposé par une personne surveillée avant que la communication ne lui ait été adressé (estimant que la décision n’ayant pas été notifiée le délai de recours n’avait pas encore commencé à courir). Si l’on veut rester cohérent, on doit admettre que la personne surveillée puisse aussi recourir contre la décision autorisant la mesure de surveillance et se prévaloir de l’art. 93 LTF pour déposer un recours contre une décision qui peut causer un préjudice irréparable et ainsi éviter qu’une mesure de surveillance ne perdure et que des résultats soient exploités. La difficulté vient du fait que la personne surveillée ne reçoit évidemment pas une copie de la décision de surveillance. On ne pourra alors pas exiger d’elle qu’elle respecte le délai de recours habituel.

Droit de recours également contre une décision de mise en liberté
A noter finalement que le TF avait déjà admis au début de l’année 2011 le droit du ministère public de recourir auprès de l’autorité cantonale de recours contre une décision du Tribunal des mesures de contrainte ordonnant la mise en liberté du détenu, alors que l’article 222 CPP ne prévoyait qu’un droit de recours du prévenu (ATF 137 IV 22).

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