La Suisse et le bitcoin

Le Conseil fédéral suisse a publié le 25 juin 2014 son «Rapport sur les monnaies virtuelles en réponse aux postulats Schwaab (13.3687) et Weibel (13.4070)». La FINMA a également ajouté discrètement sur son site une fiche d’information «Bitcoins» qui résume le rapport.

En bref, le Conseil fédéral retient que l’importance économique des monnaies virtuelles en tant que moyen de paiement est actuellement insignifiante et invite les utilisateurs de bitcoins à ne s’en servir qu’avec prudence. Les monnaies virtuelles n’évoluent toutefois pas dans un monde de non-droit.

Le bitcoin, techniquement, c’est quoi ?
Le bitcoin est une monnaie dite cryptographique (crypto-monnaie), dont le système de paiement repose sur un réseau numérique «pair à pair» (peer-to-peer).

L’utilisateur enregistre ses bitcoins dans un porte-monnaie électronique (lié à une adresse bitcoin). Pour effectuer une transaction, l’utilisateur donne un ordre dans le réseau, qui sera vérifié par un autre type d’acteurs, les mineurs. De manière simplifiée, les mineurs mettent à disposition du système des ressources informatiques pour qu’il puisse fonctionner (plus particulièrement pour résoudre des équations informatiques nécessaires à vérifier que le bitcoin n’a pas déjà été dépensé). Les mineurs sont alors récompensés en bitcoin pour leur travail. De nouveaux bitcoins sont ainsi créés, mais leur progression est limitée (progression lente et plafonnée).

Le bitcoin, juridiquement, c’est quoi ?
Le bitcoin n’est pas une monnaie qui a cours légal mais c’est une valeur patrimoniale. L’utilisation du bitcoin comme moyen de paiement en Suisse est légale et n’est pas soumise à autorisation. Il en va de même de l’échange de bitcoins en francs, d’une plate-forme qui met en lien des acheteurs et des vendeurs ou qui accepte les bitcoins en paiement d’une contre-prestation.

Celui qui gère des dépôts de bitcoins sera en revanche soumis à la loi sur les banques. En effet, celui qui accepte des dépôts du public à titre professionnel (soit celui qui accepte plus de 20 dépôts sur une longue période ou qui fait de la publicité) doit être au bénéfice d’une licence bancaire. Des exceptions pourraient s’appliquer dans certains cas (notamment pour les comptes d’exécution), mais l’analyse est assez délicate.

L’acceptation, la garde, le placement ou le transfert de valeurs patrimoniales appartenant à un tiers étant soumises à la loi sur le blanchiment d’argent, elle trouvera fréquemment application, en particulier parce qu’il n’est pas possible de distinguer s’il s’agit d’une opération de change ou de transmission de fonds (l’identité des parties n’est pas connue et la contrepartie du bitcoin peut être versée à un tiers…). Ainsi l’achat et la vente de bitcoins à titre professionnel sont soumis à la loi sur le blanchiment d’argent. Cela vaut aussi pour l’exploitation de plateformes de négoce qui transfèrent des montants en bitcoins ou en monnaies traditionnelles d’utilisateurs à d’autres.

Conclusion
L’utilisation d’une monnaie virtuelle n’est pas illégale en Suisse.

Celui qui l’utilise pour payer une prestation (ou pour se faire payer une prestation) ne doit pas respecter de règles particulières. Il doit néanmoins assumer les risques liés à cette monnaie et ne peut pas compter sur l’Etat pour empêcher une dévaluation de la monnaie par exemple.

L’achat et la vente de bitcoins à titre professionnel, de même que la gestion de dépôts, sont en revanches soumis à la loi sur les banques (donc sujet à une licence bancaire) et à la loi sur le blanchiment d’argent (donc sujet à une affiliation à un organisme d’autorégulation à l’obtention d’une licence d’intermédiaire financier).

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